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FOCUS INNOVATION : Transdev au cœur de l’électromobilité

tanguy bouton

 

Tanguy Bouton est responsable de la transition énergétique chez Transdev Groupe. Aujourd’hui, Transdev exploite environ 2 200 véhicules électriques. L’opérateur en exploitait qu’une cinquantaine en 2015, l’objectif est d’en exploiter plus de 5 000 à horizon 2025.

Bonjour Tanguy, pourriez-vous nous dire quel est votre périmètre d’actions en tant que responsable de la transition énergétique et comment cette dernière est insufflée dans l’entreprise ?

Transdev est présent dans 18 pays, dont 13 où le groupe exploite des cars et bus électriques. Pour nous, la transition énergétique, c’est d’abord coller aux objectifs légaux de chaque pays : la loi transition énergétique en France, le Green deal aux Pays-Bas ou encore la directive véhicules propres en Europe. C’est aussi proposer les solutions les plus adaptées aux territoires en respectant un équilibre technico-économique qui permet de proposer des services dans les meilleures conditions. Je travaille pour Transdev Group donc mon périmètre est international.

Pourquoi ce poste existe et depuis quand ?

Le poste de Directeur flotte groupe existait déjà avant mon arrivée et je remplaçais la personne qui occupait ce poste auparavant. En revanche depuis 2020, nous avons créé une équipe dédiée à l’électromobilité. En effet, l’arrivée de véhicules électriques en remplacement de véhicules diesel implique des connaissances et compétences bien spécifiques. Pour adresser au mieux les besoins de Transdev, nous avons créé la Zero Emission Team dont les objectifs reposent sur quatre piliers :

  • Support aux activités et aux appels d’offres
  • Développement d’outils d’aide à la décision
  • Communication
  • Gestion de la connaissance et formation des équipes techniques et opérationnelles

L’idée est de partager les meilleurs pratiques et process développés pour l’introduction, le déploiement et les réponses d’appels d’offres autour du marché.

Quel est l’impact de la législation française /européenne sur votre métier ? Quels sont selon vous les verrous à débloquer pour faciliter la transition énergétique ?

Le département des relations institutionnelles s’occupe de la veille réglementaire. Il y a des évolutions assez fréquentes. Je pense notamment à l’autorisation d’exploiter des véhicules alimentés avec du biodiesel dans des ZFE (Zones à faibles émissions), mise en place très récemment en France, ce qui n’était pas possible jusqu’alors et de fait permet d’avoir une meilleure flexibilité opérationnelle.

Les objectifs sont différents d’un pays à un autre. Par exemple aux Pays-Bas, toutes les activités de transport public doivent être réalisées avec des véhicules zéro émissions d’ici 2030 et à partir de 2025, seules l’acquisition et la mise en exploitation de véhicules zéro émissions seront autorisées. C’est un pays qui est en avance de phase par rapport à ses voisins européens.

Au niveau des freins, bien sûr, le tissu industriel autour du véhicule électrique est en cours de développement. La technologie évolue très rapidement et ce qui est vrai un jour ne l’est plus six mois après. Prenons les batteries par exemple. Leur performance ne cesse de s’améliorer. Le marché de l’énergie va être de plus en plus tendu et l’approvisionnement en matière première pour la fabrication des batteries également.

On entend de plus en plus parler du SCOP3, du reporting environnemental qui va être un réel challenge pour mesurer le gain environnemental de la fabrication de véhicules à énergies alternatives.

Quels sont les freins au développement du parc de véhicules électriques ?

Il y a plusieurs aspects à considérer. Pour commencer, un véhicule a une durée de vie d’une quinzaine d’années en Europe. Donc en respectant les âges moyens et les âges maximum, les renouvellements de véhicules se font au fil de l’eau. Transdev est très engagé sur les aspects retrofit de véhicules existants ce qui permet d’accélérer la transition énergétique sur les flottes actuelles sans forcément parler de renouvellement de véhicules. D’ailleurs c’est quelque chose qui, sur la scène internationale, peut pousser à se poser la question des durées de vie maximales des véhicules électriques. Jusqu’alors, le renouvellement de véhicules étaient surtout fait pour renouveler les générations de motorisation euro, donc limiter les émissions polluantes. En revanche aujourd’hui, qu’un véhicule électrique ait 5, 10 ou 15 ans, il émettra à priori autant de polluants. Ce que l’on constate en Australie et en Amérique latine, c’est que les châssis roulent jusqu’à 25 ans donc il n’est pas forcément nécessaire de changer de véhicules.

Ce qui est important, c’est d’essayer d’avoir une vision à long terme et anticiper les différentes phases de manière à éviter des travaux supplémentaires pour la transformation des dépôts au fur et à mesure de l’arrivée des véhicules.

La prochaine innovation en matière de transition énergétique à suivre selon vous ?

L’innovation est continue sur les batteries et chaînes de tractions qui sont évolutives avec l’arrivée des véhicules électriques. Il y a plusieurs stratégies différentes entre des moteurs roues, des essieux motorisés, des prises sur le pont directement ou même des boîtes à deux rapports.

A mon sens, on ne peut pas vraiment parler de transition énergétique si les véhicules n’ont pas un taux de remplissage suffisamment élevé pour permettre de réduire les émissions polluantes dues à la voiture individuelle.

C’est le réel challenge pour les années à venir parce que le véhicule individuel électrique ne permettra pas de couvrir l’ensemble des besoins des particuliers alors que les transports publics avec des flottes captives, des véhicules qui reviennent tous les soirs à leur dépôt d’origine et dont on connaît les missions en avance, sont plus faciles à électrifier que des véhicules individuels.  

Un exemple de ville européenne dans laquelle la transition énergétique fonctionne bien ? Quelle ville est exemplaire, inspirante ?

Les Pays-Bas sont aujourd’hui les plus avancés en Europe et en dehors de la Chine (98 % du marché des véhicules électriques est aujourd’hui en Chine). Les Pays-Bas ont créé des conditions qui permettent aux opérateurs d’investir dans des flottes de véhicules électriques. Tout simplement car tous les contrats ont des durées de quinze ans. Les véhicules et les infrastructures sont totalement amortis sur la durée des contrats et il n’y a pas de risque de valeurs résiduelles dans les comptes des opérateurs, ce qui est un facteur clé de succès pour l’électrification des flottes. Par ailleurs, chaque contrat peut être remis en concurrence au bout de 10 ans mais dans ce cas-là, il y a coût de transfert des véhicules et des infrastructures de recharge à un prix fixe et selon une dépréciation annuelle sur une durée de quinze ans. Tout cela permet aux opérateurs d’accélérer l’électrification.

Pourriez-vous nous parler d’un projet marquant pour Transdev en termes de transition énergétique ?

Je citerais la ville de Bogota. Aujourd’hui, il y a encore des véhicules euro 3 et euro 4 qui sont en circulation. Pourtant, on vient de mettre en circulation 406 véhicules de 9 et 12m qui sont rechargés sur le même dépôt et permettent d’accélérer la transition énergétique sans passer par les générations de véhicules intermédiaires.

En fonction de chaque territoire et des opportunités d’énergie en termes de circuit court, on constate des mix énergétiques différents : des biocarburants, des bioGNV, des véhicules électriques parfois des véhicules à hydrogène également… Mais cela dépend vraiment des opportunités et enjeux des territoires.

En France, Transdev est engagé sur l’hydrogène notamment à Lens, Auxerre, Toulouse et bientôt Rouen. Nous accompagnons les directions techniques de nos partenaires et des collectivités pour leur proposer les meilleures solutions et arbitrages technico-économiques pour la transition énergétique.

Si l’on parle d’électrification des flottes, les villes de Valence et Rouen et plusieurs agglomérations mènent des appels d’offres avec des ambitions vers la mobilité électrique et Transdev s’efforce de répondre et d’accompagner au mieux l’ensemble de ces collectivités.